6 L’approche quantitative de la balance bénéfice risque

     

Comme nous l’avons vu dans la section précédente, de plus en plus de traitements induisent des effets délétères (par exemple les hémorragies, parfois mortelles, avec les anticoagulants et antiagrégants plaquettaires). Paradoxalement, plus un traitement est « puissant », plus il est susceptible d’apporter un bénéfice, mais aussi des effets délétères (on peut aussi prendre comme exemple le domaine des anticoagulants avec les stratégies d’intensification par augmentation de dose ou association d’antiagrégants ou antiagrégant et anticoagulant). Le terme « balance bénéfice risque » prend alors toute sa dimension dans l’appréciation in fine de l’intérêt clinique du traitement et la prise de décision. Ces situations (de plus en fréquentes) montrent aussi que l’on ne peut plus se contenter d’une simple recherche de traitement (complètement) sûr.

Ce qui pourrait justifier d’utiliser un traitement présentant des risques avérés est que, lorsque le patient débute le traitement, la probabilité qu’il en tire un bénéfice clinique soit supérieure à la probabilité qu’il pâtisse d’un effet délétère (et à condition aussi qu’il n’existe pas de meilleur traitement, plus sûr).

La question se pose en probabilité, car, comme pour tout le domaine de l’évaluation des thérapeutiques, il existe une variabilité inter-sujets irréductible qui fait que les évènements délétères ne surviennent que chez quelques patients sans qu’il soit possible de les identifier à priori, et que les évènements que cherche à éviter le traitement surviennent également de manière tout aussi erratique et imprévisible. Ainsi le modèle probabiliste permet de gérer ce caractère imprévisible et aléatoire pour formaliser le processus décisionnel dans un univers aussi incertain à priori.

Au moment de la décision d’instaurer un traitement pour un patent donné, il est impossible de savoir de quoi l’avenir sera exactement fait : est-ce que le patient va faire un effet indésirable ? Est-ce qu’il ferait l’évènement que l’on cherche à prévenir sans traitement ? Ne va-t-il pas malgré le traitement faire cet évènement ?  La gestion de cette incertitude note n° 7 repose alors sur les probabilités. Ainsi, avec ces traitements efficaces, mais aussi pourvoyeur d’effets indésirables graves, l’instauration d’un traitement présente un intérêt tant que la probabilité à priori (au moment de la prescription) du bénéfice est supérieure à la probabilité de l’effet indésirable.

En d’autres termes le traitement gardera un intérêt tant que les évènements indésirables qu’il induit ne viennent pas contrebalancer en totalité le bénéfice qu’il apporte. Les évènements indésirables qu’il induit ne doivent donc pas compenser numériquement les évènements qu’il permet d’éviter.

Cette évaluation peut se faire de différentes manières, soit à partir des tailles d’effet sur les critères d’efficacité et de safety produite par l’essai [2 , 24] , soit directement par un critère de jugement composite.


[7] liée à l’absence d’outils prédictifs fiables pour la situation clinique considérée ou à une nature réellement aléatoire des évènements cliniques