#F021 Ibuprofène et symptômes infectieux : des liaisons potentiellement dangereuses ?
De quoi parle-t-on ?
D’aggravation d’infections bactériennes à streptocoques suite à la prise d’AINS dans un contexte de douleur aigue non rhumatologique et/ou fièvre et/ou toux, et ce même en cas d’association à un antibiotique.
Pourquoi a-t-on choisi d’en parler ?
Le dernier rapport de Pharmacovigilance sur les infections bactériennes graves à streptocoque déclarées avec les AINS, réalisé par les CRPV de Tours et de Marseille a été présenté à l’ANSM en 2024 (CR mis en ligne) (1).
Cette actualisation a été demandée, en 2023, suite à la déclaration de 4 cas pédiatriques dont 3 décès liés à des infections à streptocoque A avec prise d'ibuprofène dans les 48h précédentes.
Ce rapport montre notamment que les infections bactériennes sévères représentent une part très importante des effets indésirables « graves » déclarés avec l'ibuprofène. De nombreuses déclarations de pharmacovigilance concernaient plutôt une population pédiatrique ou de jeunes adultes sans facteur de risque. Les patients présentaient des tableaux cliniques nécessitant le plus souvent une hospitalisation.
Compte tenu de la sous notification habituelle en pharmacovigilance, a fortiori pour une classe médicamenteuse ancienne, l’augmentation du nombre de cas « graves » de 2020 à 2023 dans un contexte de diminution des ventes est particulièrement inquiétant.
De plus, des données expérimentales particulièrement solides en soulignent le risque intrinsèque à travers l’effet des AINS sur l’amplification de la diffusion des streptocoques (2,3,4).
Dans un contexte de recrudescence réelle des infections invasives à streptocoques A dans les pays industrialisés et notamment en Europe (dont la France), la délivrance et la prescription d’ibuprofène, de kétoprofène et de fénoprofène pour la fièvre et/ou la douleur non rhumatologique est donc une pratique particulièrement à risque, même sur une courte durée, et même en cas d’association à un antibiotique.
Avec la mise en place des tests rapides d'orientation diagnostique (TROD)en pharmacie et de la délivrance possible d’antibiotique directement par les pharmaciens, sans prescription, en cas d’angine ou de cystite, ces nouvelles informations méritent être connues du plus grand nombre, afin d’éviter dans ce contexte, l’utilisation d’AINS, facteur aggravant de ces infections.
L’avis de la SFPT
Sur la base des études expérimentales, des cas rapportés et des nombreuses études de pharmaco-épidémiologie, les données disponibles en 2024 sont en faveur du rôle aggravant de la prise d’un AINS, en particulier de l’ibuprofène utilisé dans un contexte de fièvre ou de douleur en présence d’une infection bactérienne débutante à streptocoque (en particulier cutanée, ORL ou pulmonaire), y compris lorsque l’AINS est associé à une antibiothérapie.
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