La réponse à cette question est issue d’un consensus d’experts.
Avant la mise sur le marché (AMM)
Il semble important de rappeler que comme pour tout médicament, la sécurité d’emploi d’un vaccin fait partie intégrante de chacune des étapes de son développement, au même titre que l’évaluation de son efficacité. D’ailleurs, cette considération implique généralement d’inclure suffisamment de personnes dans les essais cliniques, et de les suivre sur une durée suffisante pour s’assurer d’objectiver un profil de tolérance représentatif, et de pouvoir mettre en évidence les effets indésirables moins fréquents et inattendus.
Ce n’est qu’à la condition d’une balance “bénéfices-risques” favorable, établie sur les critères d’efficacité et de sécurité, qu’un vaccin, ou tout autre médicament, peut obtenir son autorisation de mise sur le marché (AMM).
Toutefois, compte tenu du relativement faible nombre de personnes incluses dans les essais cliniques et de la durée courte du suivi, seuls les effets les plus fréquents et de survenue précoce sont susceptibles d’être détectés (par exemple, si l’étude a inclus 10 000 personnes, un effet qui surviendrait chez 1 patient sur 100 000 n’a que très peu de chance de survenir).
Une fois l’AMM obtenue
Une fois sur le marché, la surveillance du médicament, du vaccin, ne s’arrête pas : c’est ce qu’on appelle la phase IV du développement, où intervient la pharmacovigilance. En effet, dans des conditions d’utilisation “en vie réelle”, sur une plus large population que dans le cadre des essais cliniques, des effets rares, complexes (liés au terrain du patient ou à des interactions médicamenteuses par exemple), ou tardifs peuvent être mis en évidence.
Tout l’enjeu de la pharmacovigilance est donc de garantir que la balance “bénéfices-risques” du médicament, du vaccin, reste positive dans ses conditions d’utilisation dans la population, et ce durant toute la vie du vaccin. En cas de mise en évidence d'un nouveau risque, des mesures de minimisation des risquespeuvent être mises en place. Par exemple, si on se rend compte qu’une population définie est plus à risque de faire un effet indésirable particulier avec un vaccin précis, on pourra contre-indiquer ce vaccin à cette population, et on lui recommandera plutôt un autre vaccin qui n’est pas à risque de provoquer cet effet indésirable.
Pour en savoir plus sur la pharmacovigilance : reportez-vous à la question #153.
Ainsi, en France, la sécurité des vaccins de la Covid-19 commercialisés fait l’objet: d’une part, d’un suivi en pharmacovigilance, via les Centres Régionaux de Pharmacovigilance (CRPV), et d’autre part du suivi systématique d’une cohorte de patients. Tous deux sont sous la responsabilité de l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM).
Le suivi de pharmacovigilance en France s’intègre dans le plan de gestion des risques coordonné par l’Agence Européenne du Médicament (EMA). De plus, la sécurité sera surveillée au niveau mondial par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui centralise le suivi à Uppsala, en Suède.
En pratique, pour les vaccins de la COVID-19
Pour permettre aux CRPV de détecter des signaux, il faut que les effets indésirables soient déclarés. Cette déclaration peut être faite par les professionnels de santé ou par les patients eux-mêmes.
Attention : l’objectif n’est pas de faire une revue exhaustive des effets indésirables bénins déjà connus et étudiés dans le cadre des essais cliniques, mais de mettre en évidences des effets indésirables graves et/ou nouveaux, ayant conduit à une consultation médicale ou à une hospitalisation.
Ainsi, il n’est pas pertinent voire même contre-productif de déclarer la survenue d’effets connus et bénins, comme la survenue d’une fièvre modérée, ou de maux de têtes par exemple. Ceci risquerait d’engorger le système et de retarder la détection d'effets indésirables graves ou nouveaux.
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Afin d’aider les CRPV dans leur mission, des moyens humains supplémentaires ont été demandés. Mais ce n’est pas la seule aide dont ils vont disposer.
A partir de la mi-janvier, un système d’intelligence artificielle va être déployé. L’objectif ne sera pas de remplacer l’expertise humaine mais de fluidifier la chaine d’analyse. En effet, l’intelligence artificielle interviendra entre la déclaration des patients via le portail de signalement des événements sanitaires indésirables https://signalement.social-sante.gouv.fr/ et l’expertise des pharmacovigilants des CRPV (les déclarations provenant des médecins seront analysées en priorité sans passer par ce système).
L’intelligence artificielle va dans un premier temps transformer les verbatims contenus dans les déclarations des patients en termes médicaux selon la classification MedDRA utilisée dans les CRPV. Ensuite, elle analysera ces termes pour trier les déclarations « graves » et « non graves », sans juger du rôle qu’a joué le vaccin dans la survenue de l’effet. Ceci va permettre aux pharmacovigilants des CRPV de prioriser leurs analyses, et ainsi d’être plus réactifs dans la mise en évidence de signaux.
Les déclarations non urgentes seront traitées dans un deuxième temps.
Pour information, l’intelligence artificielle stockera uniquement les données anonymisées, et le logiciel est régit par le cahier des charges de l’ANSM en termes de sécurités des données.
Pour des informations détaillées sur la procédure de suivi, voir la QR13
Références :