2.2 La remise en cause de l’équipoise

     

Cette justification compassionnelle pose aussi des problèmes éthiques, en relation avec l’équipoise [4]. Avant la réponse apportée par l’essai, il est impossible de dire si, à priori, il vaut mieux être dans le groupe traité ou dans le groupe contrôle. Il est possible que le nouveau traitement n’apporte pas le bénéfice escompté et, même, qu’il provoque des effets délétères. Si c’est le cas, la randomisation aura minimisé la probabilité à priori pour un patient d’avoir une perte de chance s’il accepte de participer à l’essai par rapport aux soins qu’il aurait eu en standard . En proposant de faire passer systématiquement les patients du groupe contrôle vers l’inconnu que représente le nouveau traitement, cet équilibre apporté par l’équipoise est rompu. En d’autres termes, dans les cas où le nouveau traitement est en réalité inférieur au traitement standard, la pratique des crossovers fait que tous les patients de l’essai auront reçu le traitement sous optimal (contre seulement la moitié si le principe de l’essai est maintenu). La minimisation de la probabilité à priori de recevoir un traitement sous optimal n’est plus assurée et elle est même maximalisée.

Si, dans un essai, les crossovers ont été prévus, car il est d’ores et déjà certain que l’inclusion dans le groupe contrôle implique une perte de chance pour les patients, cela signifie que l’équipoise n’est pas vérifiée et que l’essai est de toute façon contre l’éthique. Offrir la possibilité des crossovers ne solutionne pas ce problème.