2.1 Le risque de faux négatif

     

Les crossovers dans les essais d’oncologie vont poser un problème majeur au niveau de l’évaluation de l’effet du traitement sur la survie globale. En effet, si le traitement évalué est supérieur au contrôle en termes de mortalité, le fait que des patients du groupe contrôle en bénéficient conduit à une réduction de la différence en termes de décès entre les 2 groupes à la fin de l’essai. L’essai pourra ainsi ne pas montrer de différence de mortalité, car, finalement, les deux groupes auront reçu le traitement étudié (le groupe expérimental de manière protocolisée dès la randomisation, le groupe contrôle au fils des progressions).

Paradoxalement, avec les crossovers, plus le traitement évalué sera efficace sur la mortalité, moins il sera probable que l’essai puisse le montrer. Bien entendu, la dilution de l’effet qu’entrainent les crossovers dépend de l’effet du traitement sur la mortalité, de la proportion de patients qui font un crossover et du temps par rapport à la fin de l’essai où a été effectué ce crossover.

Ce phénomène ne concerne pas la survie sans progression, car le critère de progression est acquis lorsque le patient fait le crossover. Le temps jusqu’à progression qui sera considérée pour les patients du groupe contrôle lors de l’analyse de la PFS sera bien celui passé uniquement avec le traitement comparateur. L’estimation de l’effet du traitement évalué s’effectuera bien en comparant un groupe traité avec ce traitement et un groupe contrôle, ne recevant pas ce traitement.

Compte tenu de ces conséquences [2], les crossovers qui étaient autorisés assez fréquemment dans les protocoles il y a quelques années, le sont nettement moins actuellement. La justification de cette pratique était plutôt d’ordre compassionnel et permettait aussi d’augmenter l’acceptabilité des protocoles auprès de certains investigateurs mal à l’aise avec la randomisation. Ces crossovers mettent cependant en question l’intégrité scientifique de l’essai (en faisant courir le risque d’un résultat faussement négatif par destruction du contraste expérimental entre les 2 groupes).

Les crossovers peuvent aussi masquer un effet délétère du traitement sur la survie globale [3], de la même façon qu’ils peuvent empêcher la mise en évidence d’un bénéfice sur cette même survie globale.