1 Introduction

     

Le terme de design adaptatif (ou essai adaptatif) recouvre un ensemble hétérogène de schémas expérimentaux ayant en commun, selon la définition de la FDA, la possibilité d’apporter des modifications planifiées de manière prospective à un ou plusieurs aspects de l’étude, sur la base de données accumulées au cours de l'essai [1] . Le caractère adaptatif d’un essai peut ainsi concerner des objectifs variés [1 , 2 , 3] , parmi lesquels :

  • Adapter le nombre total de patients à inclure dans l’essai : une vérification des hypothèses sur lesquelles se basait le calcul d’effectif initial après avoir inclus une partie des patients permet de réévaluer (en aveugle ou non) l’effectif en cours d’étude ou évaluer sa puissance conditionnelle, qui est la probabilité que le résultat final de l'étude soit statistiquement significatif, compte-tenu des données déjà observées [4] .
  • Prendre une décision sur la poursuite ou non de l’essai : les essais séquentiels en groupes (group sequential designs ) prévoient différentes analyses intermédiaires ainsi que des critères d’arrêt définis a priori . Ces règles d’arrêt offrent la possibilité de conclure précocement à l’efficacité ou à la futilité (c’est-à-dire une faible probabilité que le traitement soit efficace à la fin de l’essai) du traitement.
  • Adapter la population de l’essai : les stratégies dites « d’enrichissement » (adaptive enrichment ) permettent de définir des sous-groupes de patients répondant le plus au traitement, sur la base d’une ou plusieurs analyses intermédiaires, et de focaliser sur la poursuite de l’essai sur ces sous-groupes.

Le terme « d’essai adaptatif » recouvre également d’autres approches, que nous ne détaillerons pas dans ce chapitre :

  • Adapter le traitement ou la dose : la modification de la dose est de longue date réalisée dans les essais de phases précoces, selon une démarche algorithmique (par exemple 3+3). Une approche adaptative consiste à modéliser la probabilité de survenue d’un événement. C’est par exemple le cas des méthodes CRM (Continual Reassessment Methods ) qui utilisent les données accumulées dans l’essai pour déterminer la dose administrée au patient suivant, selon une approche bayésienne.
  • Introduire ou arrêter de nouveaux bras de traitement : dans certains cas, plusieurs doses sont testées en parallèles, et certaines peuvent être abandonnées en cours d’essais à la suite d’analyses intermédiaires, selon un design séquentiel en groupes. Les essais plateformes  représentent un autre exemple d’essais adaptatifs : plusieurs traitements sont comparés à un même contrôle, qui représente le standard de prise en charge ; certains bras peuvent être introduits ou arrêtés, selon des règles prédéfinies.
  • Adapter l’allocation des patients : c’est le cas par exemple des méthodes de minimisation, qui visent à équilibrer les groupes sur certaines caractéristiques lors de la randomisation, en se basant sur les caractéristiques des patients déjà inclus. D’autres approches, plus controversées, consistent à adapter la randomisation en fonction des résultats intermédiaires accumulés au cours de l’étude [5] .
  • Adapter la dose ou le choix du traitement qui sera évalué dans une phase ultérieure du développement, dans le cadre d’essais combinés (également appelés « sans couture », seamless ). Ces essais peuvent regrouper des études de phase 1 et de phase 2, ou de phase 2 et de phase.

Les designs séquentiels en groupes et la réévaluation du nombre de sujets nécessaires en cours d’essai sont actuellement les formes les plus courantes d’essais adaptatifs. Ils présentent de nombreux avantages [1] , que nous détaillerons dans ce chapitre :

  • Sur le plan statistique, ils maximisent les chances de démontrer l’efficacité du traitement (donc la puissance), ou à puissance équivalente minimisent le nombre de patients inclus.
  • Sur le plan éthique, ils permettent d’arrêter précocement un essai qui aura trop peu de chances de démontrer une supériorité du traitement (futilité), évitant ainsi d’exposer inutilement des patients à un risque d’effet indésirable. A l’inverse, un arrêt précoce pour supériorité permet de proposer à tous les patients le traitement le plus efficace.
  • Leur flexibilité est un atout pour les promoteurs et les financeurs des essais, les arrêts précoces étant synonymes d’essais moins longs et moins couteux.