4.4 Dépendance des résultats à l’apriori

     

La principale limite de l’inférence bayésienne pour l’évaluation des nouveaux traitements (et qui a été longtemps un frein à l’adoption de cette approche) est le fait que l’apriori arbitraire peut conditionner presque en totalité le résultat (à postériori) indépendamment de ce qui a été observé dans l’essai, cette limite a été longtemps un frein à l’adoption de cette approche.

Plus l’apriori est non informatif, plus le résultat à posteriori est conditionné par les données observées. Plus l’apriori est informatif (de façon objective du fait de données déjà connues, ou subjective du fait de croyance pure), moins le résultat à posteriori est conditionné par les données observées.

Ce risque est illustré par l’exemple présenté Figure 6.

Figure 6 – Illustration de la dépendance des résultats bayésiens à l’apriori

Distribution apriori

Distribution à posteriori (et résultat fréquentiste IC 95%)

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Distribution à priori choisie, cette distribution est en faveur d’une réduction de 50% du critère de jugement (RR=0.5) avec une certitude élevée (distribution étroite)

Les données de l’essai sont en faveur d’un doublement de la fréquence du critère de jugement (RR=2, cf. l’intervalle de confiance IC 95% fréquentiste à droite en gris). Malgré cela, en raison de l’apriori choisi, la distribution à postériori (en bleu) des risques relatifs est entièrement faveur de la réduction du critère de jugement, avec une moyenne de 0.6 (cf. intervalle de crédibilité ICr, à gauche, en vert) et une probabilité que RR<1.0 égale à 1.

Cette possibilité est inacceptable dans le contexte de la confirmation par les faits du bénéfice des traitements. Il est cependant possible de faire de l’inférence bayésienne avec un apriori complètement non informatif, c’est-à-dire qui ne privilégie à priori aucune valeur de l’effet traitement (comme dans le cadre fréquentiste où aucune hypothèse n’est faite sur l’effet du traitement). Dans cette situation le résultat à postériori est entièrement conditionné par les données de l’étude.

Exemple d’une documentation du choix de l’apriori

The prior probability of outcome for each treatment group was assumed to follow a noninformative beta distribution, which yielded a beta distribution for the posterior probability when a binomial likelihood was assumed for the outcome [12]


Dans certaines situations, un apriori informatif sceptique (pessimiste, skeptical en anglais ) peut être utilisé comme analyses de robustesse. Il s’agit d’un apriori qui « croit », qu’à priori, le traitement n’est pas efficace avec une assez forte certitude (distribution étroite). Si malgré cet apriori, un bénéfice est mis en évidence cela témoigne de données fortement en faveur de l’efficacité. Cette approche est surtout utilisée pour interpréter à but exploratoire des résultats de découverte fortuite (cf. par exemple [17] ).

Il est aussi possible d’utiliser comme « à priori » les résultats d’une étude précédente. Cependant une étude fréquentiste ne permet pas d’estimer une distribution de l’effet traitement. Il est alors nécessaire de réanalyser cette étude initiale en Bayésien avec un apriori non informatif pour obtenir un résultat sous une forme utilisable comme « à priori » de la nouvelle étude. Finalement cette opération revient à faire la méta-analyse des 2 études et reconnecte avec la problématique de l’acceptabilité des méta-analyses comme preuve de l’efficacité.